En 1937, Marie Claire, d’abord hebdomadaire, mensuel par la suite, voit le jour. La volonté des créateurs, Jean Prouvost et Marcelle Auclair, est de renouveler la presse féminine de l’entre-deux-guerres et de créer un magazine féminin où mode et beauté auraient l’exclusivité. Depuis, Marie Claire a « gardé sa ligne » éditoriale.
« Ce qui nous rend vraiment belle : les hommes nous disent tout », « 10 ans de moins en 10 minutes », « Minceur : des recettes poids plume », ces titres, ce sont ceux de Marie Claire depuis des années. Conseils beauté, conseils sexualité, conseils minceur, conseils mode : tout tourne autour de l’obsession du « physique parfait ». Comme l’a dit son créateur, Jean Prouvost, la cible du lectorat est « jolie, coquette, mariée, vingt-cinq-ans, deux enfants ». Cliché.
Des choix éditoriaux sexistes ?
Marie Claire c’est certes des Unes et des titres caricaturaux, voire réducteurs pour les femmes, mais c’est aussi des polémiques. En 2019, le magazine publie une interview de Yann Moix disant que « ça ne lui viendrait pas à l’idée » de partager la vie d’une femme du même âge que lui (50 ans). Il ajoute même : « Ah non, il ne faut pas exagérer ! […] Je trouve ça trop vieux ».
Bien que l’interviewer l’ait repris en lui disant que ces propos étaient « choquants » voire « horribles pour les femmes », le magazine a tout même publié ses propos en se défendant : « ces mots — qui illustrent un jeunisme pour le moins banal — n’ont pas choqué que nous, et c’est tant mieux. En tant que journal, nous n’échangeons pas qu’avec celles et ceux qui pensent comme nous : nous affrontons la réalité, y compris quand elle nous heurte et nous malmène ». On peut quand même s’interroger sur la nécessité de la publication. D’autant plus dans le contexte actuel, où la lutte contre le sexisme est à son apogée.
Les photographies de femmes à la beauté moins « standard » étaient réservées aux pages secondaires, et non en couverture
Le magazine ne compte pas qu’une polémique à son actif. L’interview en 2009 de l’acteur Yvan Attal en est un autre exemple. A la question « comment réagiriez-vous si votre épouse [Charlotte Gainsbourg] partait avec un ouvrier » — comme dans le film dont il faisait la promotion à l’époque, a répondu : « je prends la carabine et je la tue. Je ne tue pas l’ouvrier, je la tue elle ». Marie Claire, a attendu neuf ans — le 31 décembre 2018, pour ajouter que le magazine « ne cautionnait pas ses propos violents ».
Rendre coupables les femmes
Août dernier, le magazine veut surfer sur la vague du « body positive » — mouvement social en faveur de l’acceptation et l’appréciation de tous les types de corps. Son titre : « Aimer son corps pour célébrer toutes les morphologies ». Sa Une revendiquée fièrement comme « non retouchée » était : Arnelle Slot, mannequin d’1m75 et de taille 34. Nombreux internautes ont très vite réagi sur le fait que le mannequin « n’avait pas grand-chose à retoucher » et que les photographies de femmes à la beauté moins « standard » étaient réservées aux pages secondaires, et non en couverture.
Marie Claire est certes un magazine féminin, mais est-il vraiment — comme il se revendique — de bon conseil ? Dans un monde, où l’on sait le pouvoir des mots et des images, le magazine ne rend-il pas plus coupables les femmes, qu’il ne les inspirent ?