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Les débats d’entre-deux-tours élisent-ils les présidents ?

Les débats d’entre-deux-tours sont dans les moments les plus marquants d’une élection présidentielle où les deux finalistes tentent d’affaiblir l’autre à l’approche de la date fatidique. Ils rentrent dans les annales de l’histoire de la télévision par leurs petites phrases bien piquantes lancées au concurrent. Mais ce face-à-face est-il amené à changer le cours d’une élection ?

Débat d’entre-deux-tours entre Valéry Giscard D’Estaing et François Mitterand 1981

« Je crois que j’ai été élu président de la République grâce à une phrase de dix mots : « Mais, Monsieur Mitterrand, vous n’avez pas le monopole du coeur » ».

Valéry Giscard d’Estaing, dans son ouvrage autobiographique Le Pouvoir et la Vie en 1998

Dans ses mémoires, Valéry Giscard d’Estaing affirme avoir gagné les élections de 1974 face au président sortant grâce à cette célèbre réplique. Tellement célèbre qu’elle possède sa propre page Wikipédia. Pourtant, ce qui fût le premier débat d’entre-deux-tours, n’a pas vraiment changé la donne du scrutin. D’après l’institut de sondage Sofres, le candidat Giscard n’avait gagné que… 0,5% de point de popularité au lendemain de l’entrevue. Sa côte est même revenue au point de départ 3 jours plus tard ! 

Une diffusion télé grandissante mais toujours peu d’influence

En 1974, déjà 70% des ménages français sont équipés d’un poste de télé. Ce chiffre ne fera qu’augmenter au fil des décennies et donc des débats. Mais pour l’historien des médias Christian Delporte, les débats d’entre-deux-tours « affirment des personnalités » et une base d’électeurs plus qu’ils ne servent à convaincre les indécis. Chaque « camp » se range derrière son poulain en espérant qu’il détruise son adversaire à coup de phrases acerbes. Les indécis, eux, se répartissent plutôt équitablement entre les deux candidats.

Un rituel républicain

Mais les débats d’entre-deux-tours restent des moments d’émotions où chaque petit mot ou geste va être décortiqué sur tous les plateaux des chaînes d’info en continu. Dans une société de la communication, il s’agit tout de même de faire bonne impression aux Français. Les petites répliques, improvisées ou répétées, restent dans les annales de l’histoire de la télé.

Florilège des meilleures répliques des débats

En 1981, Giscard tente de prendre sa revanche sur celui qui l’a battu en 1974 en le qualifiant « d’homme du passé ». Le président de gauche lui répondra que lui « est l’homme du passif ».

« Ce soir, vous n’êtes pas le président de la République, nous sommes deux candidats à égalité (…), vous me permettrez donc de vous appeler monsieur Mitterrand »

Jacques Chirac en 1988.

1988, Chirac contre Mitterrand (encore lui). Le challenger essaie de se mettre sur un pied d’égalité avec le président aux deux mandats et 14 ans de pouvoir avec un « Ce soir, vous n’êtes pas le président de la République, nous sommes deux candidats à égalité (…), vous me permettrez donc de vous appeler monsieur Mitterrand ». Dommage pour lui, Mitterrand a de l’expérience et répond sèchement « Mais vous avez tout à fait raison, monsieur le Premier ministre ». Cela n’empêchera pas Chirac de gagner sa place à l’Élysée. 

Parfois, c’est l’absence de mots qui montre le mieux la rivalité entre deux candidats comme quand en 2002 Chirac refuse de débattre avec Jean-Marie Le Pen, premier candidat d’extrême droite à parvenir au second tour dans l’histoire de la cinquième République. Les temps ont changé, 20 ans plus tard, aurons-nous droit à un débat d’entre-deux extrême droite ?

Margaux Verdonckt
Margaux Verdonckt
Co-fondatrice, cheffe de rubrique "Écologie" et responsable de la communication de Soixante Pour Cent.

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