La limite de l’utilisation de l’eau douce aurait été franchie le 28 avril 2022. Le 18 janvier, c’est celle de la pollution chimique. Le dépassement d’une des limites planétaires fait les gros titres. Il est cependant accusé d’avoir été façonné pour les médias au mépris de la rigueur scientifique.
Pour analyser la justesse d’un point de vue scientifique et le traitement médiatique du concept de limites planétaires, nous avons fait appel à Florian Pollet. Il est vulgarisateur sur les sujets à l’écologie, plus connu sous le pseudo « Échanges climatiques”.
Deux limites dépassées en 2022 sur les 9 définies par le Stockholm Resilience Center. Autres l’avaient été en 2015 (le changement climatique, l’érosion de la biodiversité, les perturbations globales du cycle de l’azote et du phosphore et le changement d’utilisation des sols).
Cette notion de limites planétaires est très médiatisée. Pour Florian Pollet, « le concept a été créé pour sortir d’une vision purement carbone du problème. Le GIEC a très bien mis en avant les enjeux du réchauffement climatique. Le revers de la médaille, c’est que d’autres problèmes ont perdu en importance comme l’érosion de la biodiversité ». Le concept de limites planétaires donne de la visibilité à d’autres enjeux et met en valeur l’interdépendance des catastrophes environnementales.
C’est le même principe que le jour du dépassement
Florian Pollet
« Ce n’est pas spécifiquement à destination des médias, mais aussi des décideurs politiques, des ONGs et du grand public », affirme Florian Pollet. Les médias s’en sont saisis car ces limites sont faciles à comprendre et faciles à expliquer. Cela génère une actualité en plus pour mettre à l’agenda les crises écologiques. « De longs articles scientifiques décrivant l’impact humain sur des phénomènes complexes sont résumés en un concept simple: une limite à ne pas dépasser. C’est le même principe que le jour du dépassement. »
Des critiques ont été faîtes à l’encontre de cette notion mais aussi envers son traitement par les médias. Elle serait inexacte. Des limites ne sont pas considérées comme dépassées, non pas parce que la situation est bonne mais par manque de données scientifiques. C’est ce que confirme Florian Pollet à propos des deux limites qui auraient été dépassées en 2022 : « il n’y avait, jusqu’à présent, pas d’estimations assez robustes ni de seuil fixé. Autrement dit, ces deux limites étaient déjà dépassées depuis quelques temps. »
« Certains pourraient penser que ce discours alarmiste des médias est une tentative sincère de faire bouger les choses . D’une part, je ne suis pas sûr de l’efficacité de cette méthode. C’est un peu la fable de l’Enfant qui criait au loup : quand tout est alarmant rien ne l’est vraiment. Cela donne des arguments aux climato-sceptiques pour décrédibiliser le message « écolo ». Cela donne des « Tous les dix ans, on nous dit qu’il nous reste dix ans » ». D’autre part, « je trouve cela un peu naïf de prêter des intentions nobles à tous les médias qui portent ces alarmes. La gratuité de l’information pousse à produire des titres aguicheurs » sur des sujets en vogue et qui font polémique.